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L'esprit ou la matière : Teilhard de Chardin et un Cree dialoguent par l'entremise d'un médecin et de son patient

Esprit matièrePar Christian Kazandjian - Lagrandeparade.fr/ Le cabinet de consultation d'une femme médecin renvoie une lumière froide. Le patient, un physicien, y apprend le mal inéluctable qui érode son corps. Il est passionné de culture huronne véhiculant une vision d'un monde où les êtres vivent en harmonie au sein d'une nature que l'homme doit respecter. Elle est lectrice de Teilhard de Chardin (1881-1955), prêtre jésuite, anthropologue, géologue, paléontologue et philosophe, qui fut en butte à la hiérarchie d'une église qui censura ses écrits.

Pour le penseur esprit et matière forment un tout en perpétuelle évolution, raisonnement qui le rapproche de la pensée des aborigènes du Canada. Au fil des visites, des examens médicaux, le dialogue noué à travers la foi chrétienne et la physique quantique s'enrichit ; la pensée se renforce alors dans la confrontation. L'évolution renvoie à celle que l'on retrouve tant dans les théories des scientifiques matérialistes que dans celles de l'ecclésiastique. Alors que le corps rongé par le cancer s'affaiblit, l'esprit y acquiert une forme d'acuité plus vive. 

Des écrits de Teilhard de Chardin et de Joseph Boyden, écrivain cree ( Indiens Cris - peuple autochtone d'Amérique du Nord), André Daleux et Jean Quercy -ce dernier auteur de la mise en scène- ont tiré un texte qui, débarrassé de l'aridité des observations scientifiques ou ethnologiques, révèle une bonne dose d'humanité, d'amour et de respect de la vie devant l'inéluctabilité de la mort. Les deux acteurs, Brigitte Damiens et Eric Auvray, jouent subtilement de la force du verbe pour illustrer l'élévation de la pensée, quand le corps malade se détériore : on passe de la froideur de l'hôpital et de ses instruments à l'ambiance feutrée d'une bibliothèque où les livres tiennent lieu de béquilles pour l'esprit. Le gong sépulcral du début cède, quand la mort est survenue, aux roulements des tambours comme autant de battements de coeur : l'esprit du disparu demeure dans la mémoire de ceux qui restent. L'Esprit-matière ne tranche pas le problème de l'existence ou de la non-existence de dieu. La pièce pose des questions auxquelles chacun serait tenté -ou non- de répondre à son niveau de conscience. Mais l'énergie, l'empathie qu'elle dégage peut pousser -ou non- chacun de se (re)plonger dans les livres, de ranimer des interrogations enfouies. Une oeuvre salutaire dans une époque où le marché tente d'imposer la frivolité, la fièvre consumériste, l'effacement de la mémoire comme norme d'existence.

L'esprit-matière
de André Daleux et Jean Quercy
D'après l'oeuvre de Pierre Teilhard de Chardin et Là-haut dans le Nord de Joseph Boyden
Mise en scène : Jean Quercy

Dates et lieux des représentations: 

- Jusqu'au 24 mars 2018 au Théâtre de Nesle, Paris 6e (tél. : 01. 46.34.61.04), le mardis et samedis.

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