Logo

S’aimer quand même : Isild Le Besco et les fragments de vie

LebescoPar Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / Très vite, on lit : « Premier rendez-vous avec mon éditeur. On se retrouve au bar d’un petit hôtel de Saint-Germain, accompagnés d’Alina qui a pris l’initiative de nous présenter ». Ledit éditeur suggère que le livre pourrait raconter une rupture. « Une rupture en dialogues, par exemple », ajoute-t-il. Réponse : « Oui, pourquoi pas ». On plonge alors dans « S’aimer quand même », premier livre d’Isild Le Besco, 35 ans, actrice et réalisatrice française. Dans le monde du 7ème Art, elle balade l’image d’une femme porcelaine. Elle a tourné dans quelques comédies et dans des films dits « d’auteur », elle a réalisé « Demi-tarif » (2003), « Bas-fonds » (2010) ou encore « La Belle Occasion » (2017). Ces temps-ci, commentant le livre, le microcosme parisien rappelle, même ce n’est pas indispensable à savoir, qu’elle est la fille d’une comédienne et la sœur de l’actrice-réalisatrice Maiwenn… 

Aussi, la narratrice (ou peut-être bien Isild Le Besco, qui sait ?) précise : « J’aime être emmenée à travers la musique, la peinture, les livres, les films, d’émotion forte, d’émotion douce. J’aime boire un thé dans une tasse qui raconte une histoire, qu’il y ait de l’humain, de l’émotion encore, de la pensée… Toujours de la vie ». De tout cela- et encore plus, on trouve dans « S’aimer quand même ». Pour son entrée en littérature, Isild Le Besco offre un livre atypique, explosé, et un grand plein d’émotion et d’évanescence. La forme, on a la sensation qu’elle s’en moque- dans ces pages, il y a des textes courts et éclatés, des petites nouvelles, des poèmes, aussi des textes (en anglais) manuscrits et même des reproductions de dessins et peintures. « S’aimer quand même », ce sont des fractures d’amour, des fragments de vie d’une femme. De plusieurs femmes dont on ne saura jamais rien de leur physique. On est à Paris, en Chine, à Sarajevo, en Afrique, en Inde… il y a des amours heureuses et d’autres tristes, des ruptures… C’est tendre, c’est violent, c’est un livre hybride, bel objet délicatement mis en pages.
On ne peut qu’être sous le charme des mots de l’auteure. Ça sonne toujours juste, vrai- exemples : « Je voudrais te donner un soleil entier pour soigner ton âme. Pour réchauffer ce qui semble gelé », « On ne peut donc jamais guérir de cela? Du désamour? Dois-je vivre éternellement avec? Quelle fatalité! Si on n'a pas été aimée tôt, on ne le sera jamais? Quel fardeau... » ou encore « J'aimerais leur chuchoter des mots doux à l'oreille. Des mots doux pour leur cœur. Des mots d'amour, finalement ». Lectrice, lecteur, on est happé, transporté par cette femme qui raconte son amour fou pour l’homme qui a failli la tuer, par ce petit garçon qui se sent petite fille, par Marilyn Monroe  qui fuit l’Amérique pour retrouver celle qu’elle était et qui dit : « Je dois aimer mes jambes, non pas parce qu’elles ont fait les couvertures de tous les magazines du monde, mais parce qu’elles me portent simplement là où je veux aller »… par cette jeune Indienne qui ne peut se défaire du souvenir de cette nuit où de jeunes garçons lui ont balancé de l’acide sur le visage et défigurée à jamais… Images fortes, mots implacables pour des fragments de vie au féminin, sur un mode universel.
Dans toutes les pages de « S’aimer quand même », brille l’amour, gronde la colère. Les mots sont poétiques ici, canailles là. Et puis, arrive un moment (toujours ? inévitablement ?) où la communication n’est plus possible Que restent-ils de nos amours ? Nos amours défuntes… S’aimer quand même, dit-elle. Alors, on entend encore et encore, dans ces dérives de l’amour : « Je voudrais te donner un soleil entier pour soigner ton âme. Pour réchauffer ce qui semble gelé »… Forcément, s’aimer quand même…

S’aimer quand même
Auteur : Isild Le Besco
Editions : Grasset
Parution : 7 mars 2018
Prix : 18 €

powered by social2s
Copyright © 2015 LAGRANDEPARADE – All rights reserved